Dans les coulisses de la création

de Catherine Diverrès (2022 - 87’)

À partir de quelques notions artistiques fondamentales – le corps, l’espace, le mouvement, le langage, le rythme – Mémento partie 2 questionne des artistes sur la place que prennent ces questions dans leur travail, pour faire apparaître combien elles sont fondatrices et partagées, quel que soit l'art évoqué. Catherine Diverrès repart ainsi à la rencontre d'Anish Kapoor, de François Tanguy, de Daniel Jeanneteau, et d’autres avec qui elle a collaboré, afin de tenter de répondre avec eux au mystère des multiples inspirations qui modèlent chaque œuvre artistique.

>>> un film produit par l’Association d’octobre, en association avec KuB

par Catherine Diverrès

Mes entretiens avec les artistes qui témoignent dans Mémento 2 ont été articulés autour de cinq thématiques qui, à mon sens, nourrissent la création artistique : le temps, la rencontre avec des arts et des artistes remarquables, la dynamique des espaces, les corps et les langages et, enfin, la poétique et la dramaturgie. De la porosité entre les arts depuis tout temps à l’écriture singulière, ici la chorégraphie, il me semblait utile de réactiver et d'interroger des éléments de langage commun déterminants pour tout geste artistique. Ce film, je l'espère, rend compte de ce tissu inexplicable qui raconte, par affinités, les processus de pensées de vie, de création, et tente de sonder les raisons et le contexte qui les font émerger.

Rien n’expliquera jamais l’idée, qui constitue l’élément, la brique de tout processus de création et comment celle-ci surgit, mais j'ai souhaité interroger ce qui sous-tend l'acte de création des artistes, leurs influences croisées, ce en quoi leur démarche se métamorphose au contact d’une autre et comment leur trajectoire s’en trouve modifiée.

Didier Ben Loulou

Didier Ben Loulou est un photographe franco-israélien né à Paris en 1958. Il se forme à la photographie et à l’histoire de l’art, puis part s’installer en Israël en 1981. Il y fait le portrait de villes et de quartiers, notamment Jaffa et Ajami, puis s’intéresse à la violence et au sacré dans la ville de Jérusalem durant les deux intifada.

Il réalise également un projet photographique sur les cimetières juifs en Israël et Galilée, puis part à Athènes pour photographier des migrants et des gens du voyage, travaillant ainsi sur la notion d’exil. Toujours en mouvement, il passe de pays en pays depuis une dizaine d’années, alternant entre la France, Israël, le Maroc, l’Italie ou encore la Grèce. L’emploi du format carré et la couleur tiennent une place importante dans son œuvre, ainsi que l’utilisation d’appareils argentiques et le tirage Fresson. Lauréat de la Villa Médicis hors les murs en 1995, il reçoit par la suite une bourse du Fiacre de Paris. Ses œuvres sont aujourd’hui présentes dans de nombreux musées autour du monde, tel que le Victoria and Albert Museum de Londres, la Maison européenne de la photographie à Paris, le Museum of Fine Arts à Houston ou encore le Museum of Modern Art de Tel Aviv.

Cédric Gourmelon

Cédric Gourmelon est un metteur en scène français, né en 1974. Il se forme à la scénographie et à la mise en scène au TNB de Rennes, puis réalise une vingtaine de projets entre 1999 et 2019. Passionné par l’œuvre de Jean Genet, il réalise la mise en scène de quatre pièces : Le Condamné à mort, Haute Surveillance, Splendid’s et Le Funambule. Après avoir travaillé pour le Quartz à Brest, il s’exporte à l’étranger et réalise deux pièces en Russie et une au Maroc.

En 2013 il est par ailleurs lauréat de la Villa Médicis hors les murs. En plus de son activité de metteur en scène, il est également formateur de pratique théâtrale aux universités Rennes 2 et Paris 8, à l’Académie expérimentale du théâtre, au conservatoire d’art dramatique de Montpellier, à l’école d’acteurs du TNB et à l’ESAD de Paris. Il est par ailleurs le directeur artistique de la compagnie théâtrale Réseau Lilas et à la tête du Centre dramatique nationale de Béthune depuis 2021.

Jean-Luc Guionnet

Après des études d’esthétique à la Sorbonne, le saxophoniste et organiste Jean-Luc Guionnet développe de nombreux projets dans le domaine des musiques électro-acoustique, improvisée et free jazz. Il collabore régulièrement avec Éric Cordier, Olivier Benoît et Éric La Casa, avec qui il participe à plusieurs ateliers de création radiophonique de France culture.

Il est également membre du comité de rédaction de Terre des signes, une revue ouverte aux cultures non occidentales publiée entre 1995 et 1997 chez L’Harmattan. Depuis 1995, il prend part aux créations de la compagnie Hop là ! nous vivons, et, depuis 2007, il prend part à celles de Catherine Diverrès.

Daniel Jeanneteau

Daniel Jeanneteau est un metteur en scène et scénographe français, né en 1963 en Moselle. Il se forme à l’École des arts décoratifs et à l’école du Théâtre national de Strasbourg, puis réalise les scénographies de Claude Régy pendant une quinzaine d’années. Il collabore également avec d’autres artistes, comme Catherine Diverrès, Trisha Brown ou Jean-Baptiste Sastre, et, depuis 2001 il crée ses propres spectacles avec l’éclairagiste Marie-Christine Soma.

Par ailleurs, de 2008 à 2016, il est à la tête du Studio-Théâtre de Vitry, et depuis 2017 il est directeur du T2G théâtre de Gennevilliers. Il est également lauréat de la Villa Kujoyama à Kyoto en 1998, puis de la Villa Médicis hors les murs en 2022.

Anish Kapoor

Anish Kapoor est un artiste plasticien né à Bombay en 1954. Après un passage en Israël entre 1971 et 1973, il décide de partir en Grande-Bretagne pour suivre des études artistiques, d’abord au Hornsey College of Art, puis au Chelsea College of Art. Influencé majoritairement par l’artiste Paul Neagu, il gagne une reconnaissance internationale au début des années 1980. Ses sculptures sont souvent simples, avec des incurvations, et monochromatiques.

Il s’inspire à la fois de la culture occidentale et de ses origines orientales pour créer, surtout pour ses premières œuvres, souvent recouvertes de pigments, comme un clin d’œil aux traditions indiennes. Depuis le début des années 2000 il crée beaucoup à partir de miroirs, et ces créations sont de plus en plus à la limite entre l’art et l’architecture.
Il est ainsi présent dans tous les plus grands musées d’art contemporain du monde, du Tate Museum de Londres au MoMa de New York, en passant par la Fondation Prada de Milan. En 2015, il réalise l’exposition Kapoor Versailles, une exposition d’œuvres monumentales dans les jardins du château de Versailles, qui reçoit un accueil contrasté et fait l’objet de nombreuses vandalisations racistes et antisémites.
Il reçoit par ailleurs plusieurs prix, le prix Turner en 1991, le Praemium Imperiale en 2011 et le Prix Genesis en 2017. Il est également membre de l’Académie royale des arts de Londres depuis 1999 et a été adoubé par la Reine d’Angleterre en 2013.

Thierry Micouin

Thierry Micouin est un danseur, chorégraphe et vidéaste français. Après avoir obtenu une thèse de médecine, Thierry Micouin se forme au théâtre puis à la danse. Parallèlement à son activité de danseur interprète auprès de nombreux chorégraphes, il développe un travail de création et de recherche sur l’image et la vidéo, dans le cadre de la compagnie T.M Project.

En tant que chorégraphe, il a abordé la question de l’identité sexuelle avec son premier solo W.H.O, en 2006. Puis, lauréat de la Villa Médicis hors les murs en 2009, il choisit New York comme ville de résidence pour créer un projet autour de la prostitution masculine Men at Work go Slow ! Par ailleurs, depuis 2013, il collabore avec la plasticienne sonore Pauline Boyer, avec qui il crée Double Jack en 2014 puis Synapse dans le cadre du festival Mettre en scène à Rennes en novembre 2015. Ils remportent également l’appel à projets Corps, espaces sensibles du département 56 avec le projet Faille, créé au centre d’art contemporain du domaine de Kerguéhennec en septembre 2018. La même année, il démarre les répétitions d’une nouvelle pièce, Eighteen, avec sa fille Ilana âgée de 19 ans.

Marie-Christine Soma

Marie-Christine Soma est une éclairagiste française. Après avoir étudié la philosophie et les lettres classiques, puis avoir été régisseur lumière au Théâtre national de Marseille - La Criée, Marie-Christine Soma se consacre à partir de 1985 à la création lumière. Elle crée ainsi les lumières pour de nombreux artistes, tels que François Rancillac, Arthur Nauzyciel, Niels Arestrup ou encore Catherine Diverrès. En 2001, elle débute sa collaboration artistique avec Daniel Jeanneteau sur Iphigénie de Racine.

Parallèlement au travail de lumière scénique, elle a conçu les éclairages pour deux expositions-spectacles de la Grande Halle de la Villette : Fêtes foraines en 1995 et Le Jardin planétaire en 1999. Elle a également été intervenante à l’École nationale supérieure des arts décoratifs en section scénographie et à l’ENSATT à Lyon jusqu’en 2009, puis responsable du comité de lecture du Studio-Théâtre de Vitry jusqu’en 2012.

François Tanguy

François Tanguy est un metteur en scène et directeur de théâtre né en 1958. En 1966 il fonde, avec d’autres, le Studio-Théâtre de Vitry puis commence la mise en scène de pièces de théâtre dans les années 1980. Il devient le metteur en scène du théâtre du Radeau en 1984, et reçoit le prix Europe réalités théâtrales en 2009 pour son travail unique au sein du théâtre.

En effet, François Tanguy, en proposant des pièces telles que Choral, Bataille du Tagliamento ou encore Ricercar, est un des metteurs en scène les plus marquants du théâtre contemporain européen.
Artiste engagé, il s’implique également dans de nombreuses causes, notamment dans les combats pour les sans-papiers et les réfugiés de la guerre de Bosnie, pour lesquels il mène une grève de la faim en 1995.
François Tanguy décède au Mans le 7 décembre 2022.

Emilio Urbina

Emilio Urbina débute sa carrière de danseur au début des années 1990 à Madrid, auprès de Carmen Werner, et participe aux différentes créations de la compagnie Provisional Danza. C’est en France qu’il poursuit sa formation de danse contemporaine au CNDC d’Angers, et rejoint la compagnie L’Esquisse/BouvierObadia. Il a également travaillé avec Bernardo Montet, Aurélien Richard, Sylvain Groud, Kubilaï Khan Investigation ou encore Blok and Steel.

Puis, avec le danseur Rafael Pardillo, il monte la compagnie Nod Dance Company, et crée plusieurs pièces. Il est également danseur dans la compagnie Catherine Diverrès depuis 2005, participe à toutes les créations de la compagnie et assiste régulièrement la chorégraphe lors de formations professionnelles, master class et ateliers, pour le public scolaire notamment.

Catherine Diverrès est une danseuse et chorégraphe française née en 1959 en Gironde. Elle passe son enfance à cheval entre la France et l’Afrique et commence la danse classique à cinq ans, puis intègre l’école de danse Mudra en 1977. Sa carrière commence réellement dans les années 1980, grâce à ses duos avec Bernardo Montet dans des pièces comme Grand Corridor, Toboggan et Daphnis et Alcimadure. En 1982, elle part avec lui rencontrer Kazuo Ohno, au Japon. Les enseignements de ce maître du Butô auront un impact décisif sur le travail de Catherine Diverrès. En 1983, elle crée le Studio DM, Diverrès-Montet, et crée leur première pièce, Instance.

Elle réalise ensuite sept autres pièces entre 1985 et 1994, date à laquelle elle prend la direction, toujours avec Bernardo Montet, du Centre chorégraphique national de Rennes et de Bretagne (CCNRB). Elle quitte ses fonctions en 2008, mais continue ses activités de chorégraphe au sein de sa compagnie et de l’Association d’octobre. En 2010, elle crée la pièce Encor, pour la Biennale de danse de Lyon, puis rend hommage à Kazuo Ohno en 2012 avec la création du solo O Sensei. Depuis 2013, elle est installée à Vannes et continue de créer : Penthésilée, en résidence au théâtre Anne de Bretagne, Dentro, Blow the bloody doors off et Jour et Nuit. Échos, qu’elle présente depuis 2022 sera son dernier spectacle.

FRANCE CULTURE >>> Catherine Diverrès est l’invitée du Rendez-Vous, pour discuter de son rapport aux maîtres qui ont pu l’inspirer, notamment Pier Paolo Pasolini et Kazuo Ohno.

LA TERRASSE >>> Rencontre avec Catherine Diverrès, pour la sortie prochaine de son film Mémento. Elle revient sur la genèse du projet, et sa construction.