Peur bleue

de Mathurin Peschet (2022 - 26’)

Sur la côte est du Groenland, au milieu des glaces, dans un jour qui ne finit jamais, Vincent traîne son esquif, mi-traîneau mi-bateau. À Rennes, des écoliers suivent son aventure à distance. Témoin direct d'une fonte des glaces trop rapide, le voilà confronté à une concentration d'ours blancs inhabituelle.

>>> un film produit par Aligal Production

par Mathurin Peschet

Notre époque est placée sous le signe stressant de l’emballement démographique et de la consommation qui va avec. Cette accélération malmène une planète que nous avons perdu l’habitude de regarder et de respecter. Peut-être parce que nous n’en avons plus peur. Pendant des millénaires, nous avons tremblé devant son immensité et sa violence. Nous n’étions pas encore les rois du monde et nous nous sentions bien seuls face aux grands espaces. En pleine forêt, au flanc d’une montagne, dans des champs à perte de vue, ou contemplant la mer ou le désert, nous nous sentions vulnérables. Sur des générations, nous avons caressé le rêve de dominer la nature, de la contraindre pour qu’elle nous obéisse. Nous ne voulions plus dépendre du froid, de la pluie, des prédateurs. Nous rêvions d’être rassurés en dictant nos lois. Ce rêve s'est enfin réalisé. C’est notre drame.
Sur ces considérations, j'ai découvert Vincent et les images qu’il a tournées lors de son expédition au Groenland. Comment pouvais-je faire un film avec les rushs d’un autre ? J’ai pris le temps de les regarder longuement. Il m’est alors apparu que les images les plus fortes étaient celles où il était seul sur la banquise. Le film était là, dans ces quelques jours hors du temps, entre le moment où il se fait déposer sur une plaque de glace et le moment où, seize jours plus tard, ses coéquipiers viennent le chercher.

Partir en solitaire est un défi, une porte ouverte pour l'imaginaire, au milieu de ces icebergs qui fondent et menacent de disparaître. Vincent a tracé sa route et créé, sous les yeux grand ouverts des enfants, une trajectoire bien réelle dans cet imaginaire. Sous un soleil qui ne s'arrête jamais, ce film raconte l'histoire d'un aventurier passé par toutes les émotions : la joie, la peur, l'abattement, l'extase. Régulièrement, il s'arrêtait pour mener des visioconférences avec les classes. Avec naturel et simplicité, il s'est confié à la caméra et a filmé pas à pas sa progression dans un territoire de toute beauté où l'homme n'a pas forcément sa place. À mesure que l'aventure est devenue plus difficile, ce sont aussi son questionnement et ses doutes qu'il a filmés.
Pour rendre compte de cette expérience solitaire, en étant en immersion comme Vincent l'a été, j’ai décidé d’utiliser uniquement ses rushs sur la banquise, sans les accompagner d'une voix off qui aurait été superflue. Ses images sont une sorte de journal de bord, basé sur le principe du champ/contre-champ. Vincent avait aussi un drone dont il s'est servi pour filmer son parcours et parfois, cela n'était pas prévu, pour effaroucher les ours qui se dirigeaient vers lui. La bande-son a également été créée pour le film et permet de souligner les émotions du récit. Des bruitages ont été utilisés pour des sons qui n'ont pas été enregistrés sur place, comme les sons de la fonte des glaces ou celui des ours...

Originaire de Quimper, formé à l’école supérieure d’audiovisuel (ESAV) de Toulouse et aux Ateliers Varan, Mathurin Peschet est un réalisateur finistérien. Il a commencé comme loueur de caméras à Paris avant de devenir chef-monteur.
Après treize années passées dans la capitale, il revient en Bretagne avec l'aventure TV Breizh pour une émission musicale puis pour le programme Bretons autour du monde. Il passe progressivement derrière la caméra et parfois devant.

Installé à Douarnenez, il est l'auteur de documentaires en lien avec les questions environnementales, agricoles et marines ainsi que de nombreux sujets pour des magazines comme Littoral de France 3 Bretagne.

Vincent Grison grandit à Rennes. Architecte naval de formation, il est également travailleur humanitaire rompu aux missions en zones dangereuses. Il a été coordinateur de projets pour Médecins Sans Frontières en Syrie, Irak, RDC et Soudan du Sud.

Vincent navigue depuis son enfance. Il a été skipper et a fait trois traversées de l'Atlantique, dont la dernière en solitaire lors de la Mini Transat 2015 où il a fini dixième. Pour l'expédition Rennes-Pôle Nord, c'est l'esprit d'aventure qui l'a motivé avant tout, mais aussi une forte envie de parler d'environnement et notamment du réchauffement climatique. Vincent a construit son projet dans le but de faire partager son expérience aux enfants. Au total, une trentaine de classes d'écoles élémentaires de Rennes ont pu suivre son aventure et dialoguer avec lui grâce à une liaison satellite, en direct depuis la banquise.

FRANCE 3 BRETAGNE >>> Interview de Vincent Grison qui revient sur son aventure, les objectifs de cette expédition et ses envies pour le futur.

YOUTUBE >>> Vincent Grison parle de son expédition au Groenland et de réchauffement climatique dans l’émission Tedx.

OUEST FRANCE >>> Vincent Grison explique les raisons qui l’ont poussé à repartir pour une seconde expédition au Groenland, accompagné cette fois d’un scientifique et d’une photographe.